Auteur/organisation : Achille Warmant, La Fabrique de la Cité
Sous-onglet : Aménagement du territoire / Rapports
Résumé :
Les villes moyennes ont un rôle important à jouer à l’heure des grandes transitions. Elles sont directement concernées par les effets du réchauffement climatique, les mutations économiques, les transformations sociales et le vieillissement démographique. Dans le même temps, elles abritent de nombreuses initiatives locales, souvent discrètes, portées par des collectivités, des acteurs économiques ou associatifs, qui cherchent à répondre de façon concrète aux besoins de leurs territoires.
Achille Warmant, auteur de la note, explique pourquoi les transitions imposent de renouveler le regard porté sur les villes moyennes et d’adapter l’action publique à la diversité de leurs trajectoires.
Il préconise de prendre acte de la diversité des villes moyennes en proposant des outils adaptés à des enjeux spécifiques.
Sa note conclue sur 3 grandes propositions :
1) Réaffirmer une action « sur-mesure » dans les discours et dans les actes
L’un des principaux écueils des politiques publiques à destination des villes moyennes est de revendiquer une approche « sur-mesure » tout en reposant, dans les faits, trop souvent encore sur des logiques relativement standardisées. Pour une action publique plus efficace, il convient de prendre acte de la diversité des villes moyennes en proposant des outils adaptés à leurs enjeux spécifiques
Dans cette logique, la création d’un fonds national d’expérimentation territoriale représenterait un levier structurant. Il permettrait en reconfigurant certaines enveloppes existantes et en assurant leur pluri-annualité, de garantir aux territoires une visibilité et une stabilité financières indispensables.
Il s’agirait moins de mettre les territoires en concurrence que de leur offrir les conditions d’une prise d’initiative, fondée sur la confiance, la connaissance fine des contextes et la capacité à expérimenter des réponses adaptées. Ce fonds pourrait être piloté par une gouvernance collégiale associant l’État, des représentants des collectivités, ainsi que des personnalités qualifiées issues des mondes économiques, associatifs ou académiques.
2) Sortir du « chacun pour soi territorial » et de l’attractivité à tout prix
Aujourd’hui encore, les concurrences territoriales restent vives, en raison de la quête d’attractivité « à tout prix» et de politiques publiques structurées autour d’appels à projet.
Cette logique, tend à fragiliser les coopérations infra-territoriales et à alimenter une mise en concurrence contre-productive entre communes parfois voisines.
Le programme Action Cœur de Ville a pu constituer, à cet égard, une première tentative de mise en cohérence et de dialogue entre échelles d’action notamment à l’échelle intercommunale.
Cependant, un véritable tournant reste à engager vers des dispositifs de financement plus structurels, fondés sur la coopération et la solidarité territoriale plutôt que sur la compétition.
Il est urgent d’ouvrir une réflexion sur les leviers permettant d’assurer la soutenabilité financière des collectivités en décroissance démographique, qu’il s’agisse d’une évolution des critères de répartition des dotations, d’une meilleure prise en compte des charges de centralité ou de nouvelles formes de mutualisation.
Achille Warnant propose de dépasser le paradigme de l’attractivité pour lui substituer celui de l’habitabilité territoriale, entendue, selon l’économiste Olivier Bouba-Olga, comme la capacité d’un territoire à garantir le bien-être de tous dans le respect des limites planétaires et des ressources disponibles à moyen et long terme.
3) Cibler prioritairement les villes moyennes les plus vulnérables
À force de vouloir « accompagner toutes les villes », les dispositifs existants peinent parfois à transformer les situations les plus critiques.
Or, toutes les villes moyennes ne sont pas logées à la même enseigne : certaines connaissent des trajectoires favorables quand d’autres cumulent les fragilités.
Une action publique plus efficace passerait par une reconnaissance claire de ces écarts et par un ciblage renforcé des moyens sur les territoires les plus en difficulté. Cela impliquerait de construire une cartographie fine des vulnérabilités et dynamiques territoriales.
Cette priorisation gagnerait à s’appuyer sur des démarches de diagnostic partagé, fondées sur des critères transparents et construits en lien avec les élus locaux.
Les villes moyennes les plus fragiles pourraient ainsi contribuer pleinement aux transitions en cours, pour lesquelles elles se trouvent bien souvent en première ligne du fait de leur exposition accrue aux vulnérabilités sociales.
A propos de l’auteur : Géographe et politiste de formation, Achille Warnant s’est intéressé très tôt au «problème des villes moyennes » à travers l’évolution de l’action publique locale à Montluçon, Nevers et Vierzon des années 1970 à nos jours. Il s’intéresse aussi, depuis 2018, à l’expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée menée à Prémery (Nièvre) et co-dirige, depuis juin 2021, l’Observatoire de l’expérimentation et l’innovation locales de la Fondation Jean-Jaurès. Achille Warnant est aujourd’hui chargé de l’animation scientifique de la Caravane des ruralités, un dispositif de recherche et de valorisation des initiatives rurales du GIP Epau. Il est également en appui du Conseil scientifique de France Ruralités.
